Annexes.

Colonisation américaine et représentation du monde indien.

Chronologie du « problème indien ».

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Colonisation américaine et représentation du monde indien.

 

Pour une meilleure compréhension de la ligne de fuite idéologique et historique de la représentation des relations entre monde indien et monde blanc chez Aimard, il nous semble utile de faire un retour sur la profondeur historique du « problème indien ».

 

Devenue épopée nationale pour le peuple américain, la conquête de l’ouest et l’avancée du front pionnier firent émerger un discours littéraire qui s’est peu à peu incarné dans un auteur, Fenimore Cooper. Mais si la littérature s’est emparée de cette histoire, et a pu contribuer à la constitution d’une «mythologie» mettant en scène les différents protagonistes, peuples indiens d’une part, et missionnaires puis colons euro-américains d’autre part, elle a avant tout constitué une réalité historique sur laquelle il nous faut revenir.

 

La conquête : des premiers moments au milieu du XIXème siècle

 

Plusieurs solutions s’offrent à qui voudrait reconstituer l’histoire de la conquête du continent américain par les Européens. La première consiste à faire appel aux nombreux témoignages écrits dont on dispose depuis les premiers voyageurs ayant abordé les côtes du Nouveau Monde jusqu’aux colons venus à la fin du XIXème siècle s’installer en Californie. Cette source pléthorique fut largement utilisée pour la constitution d’une histoire officielle, mais elle n’en offre pas moins une vision partielle et parcellaire de la conquête, en ne donnant, bien sûr, que le point de vue des colons.

Une autre perspective consiste à tenter de recréer le climat dans lequel est intervenue l’apparition de l’homme blanc sur le continent américain et à essayer de comprendre ce qu’elle a entraîné comme bouleversements dans les structures psychologiques, sociales, politiques et culturelles des peuples amérindiens. Cette idée, née de la reconsidération de l’Indien inaugurée au XXème siècle, est à l’origine d’ouvrages dont l’intérêt est de prendre en compte ce que les peuples amérindiens ont pu penser, imaginer et faire pendant cette longue période de dépossession de leurs territoires et de destruction de leurs sociétés.[1]

 

L’histoire du continent américain ne commence pas à la fin du XVème siècle avec l’arrivée des premiers voyageurs européens. Bien qu’encore difficile à reconstituer, l’histoire de cette partie du monde avant l’arrivée des Européens est aujourd’hui de mieux en mieux connue grâce aux recherches archéologiques et historiques. Probablement venus du continent asiatique par le détroit de Béring à une période glaciaire, les peuples amérindiens ont, au cours des siècles, occupé l’espace qui leur était offert du Canada à l’Amérique centrale, jusqu’à composer une multitude de peuples dispersés à travers le continent. Adoptant des croyances diverses mais non-exclusives, les différentes sociétés indiennes semblent avoir eu des contacts entre elles depuis les origines. Comme le note James Wilson :

 

« les nombreuses similitudes entre diverses mythologies, croyances et cérémonies indiennes sont la preuve que les sociétés précolombiennes, bien loin d’avoir été encalminées dans une sorte de préhistoire immuable et intemporelle, étaient ouvertes, dynamiques et pleines de vitalité, et qu’elles adoptaient pragmatiquement les pratiques culturelles les unes des autres. »[2]

 

Cette diversité des croyances indiennes s’explique par l’enracinement des mythes originels indiens dans l’environnement naturel. Ce qui nous permet de comprendre la tolérance des Indiens envers les croyances qu’ils ne partagent pas : selon leur mode de pensée, si les étrangers croient en d’autres dieux et en d’autres récits de la création, c’est parce qu’ils viennent d’ailleurs et qu’ils ont dû forcément expliquer l’apparition du monde à leur façon.[3]

 

« Depuis l’époque de Christophe Colomb, l’aptitude des Amérindiens à syncrétiser deux réalités – à accepter que des peuples différents aient des vérités différentes, à penser que deux affirmations puissent être vraies chacune à leur façon – a toujours déconcerté et agacé des Européens élevés dans la croyance en une vérité unique et monolithique. »[4]

 

Face à cet Indien à la fois placide et tolérant, les premiers missionnaires arrivés d’Europe pour convertir ces « impurs » se sont heurtés à une impossibilité : faire accepter comme seules crédibles des croyances qui n’entamaient en rien les leurs. Habitués à voir co-exister plusieurs conceptions du monde et à s’imprégner d’elles, les différents sociétés indiennes n’ont pu adopter le christianisme comme religion unique. Ceci est d’ailleurs probablement une des raisons qui expliquent l’échec de l’évangélisation des Indiens d’Amérique du Nord, au-delà de simples aspects culturels et psychologiques.

On comprend dès lors quelles répercussions l’arrivée de colons au début du XVIIème siècle a pu avoir sur l’univers mental et spirituel des Indiens. Considérant la terre comme une ressource appartenant à la tribu et qu’il faut savoir ménager et respecter, les Indiens du Nord-Est du territoire ont peu à peu été expropriés de leurs terres par un mouvement de colonisation lent mais durable. Justifiant leurs actes par un raisonnement de philosophie politique, les puritains fournirent l’argument selon lequel les populations autochtones ne possédaient pas ces territoires car elles ne le cultivaient pas.[5] Et peu importe si les Indiens ont une autre conception de la propriété et si certaines tribus connaissent et pratiquent la culture du sol, l’important est pour eux d’étendre les possessions du Roi d’Angleterre ou de France et d’exploiter les ressources qu’elles offrent : des compagnies se voient ainsi octroyer des chartes leur permettant de tirer profit du sol (en pratiquant la culture extensive et l’exploitation des ressources souterraines) et de la faune (le commerce des peaux devient florissant à cette période mais concerne surtout les établissements français et espagnols).

 

Au cours du XVIIème siècle, les peuples indiens deviennent peu à peu une menace pour la pérennité du commerce et le bien-être des colons. [6] Eloigner les Indiens des zones colonisées devient alors un impératif pour une population décidée à voir en l’Amérique un nouvel Éden. Une lutte armée autour de la possession des terres s’organise entre colons et Indiens. En effet, d’abord terrifiés par les armes à feu, les Indiens s’en emparent progressivement, avec l’aide des colons qui leur fournissent, jusqu’à se révéler souvent bien plus habiles au combat.[7] Pour signer une paix provisoire et devant la résistance indienne, de nombreux traités entre les deux parties sont conclus. Ces accords reconnaissent aux Indiens le droit d’exister et de rester sur la terre de leurs ancêtres sans être refoulés sans cesse vers l’ouest. Malheureusement, la pression des colons est souvent telle qu’il est impossible pour les autorités d’arrêter le flux de migration vers les territoires indiens. Et la colonisation des terres s’accompagne de la destruction d’un milieu naturel si important pour des populations vivant en adéquation avec la nature depuis plusieurs siècles. L’occupation grandissante des lieux sacrés et des zones dédiées autrefois à la chasse modifie considérablement la relation des tribus indiennes avec leur univers, et affecte profondément le mode de vie et la spiritualité indiens. Sans compter les fléaux qui frappent de plein fouet les communautés comme les maladies venues d’Europe contre lesquelles les organismes indiens n’ont pas pu développer leurs défenses immunitaires.[8]

Si, au cours des XVIIème et XVIIIème siècles, l’Indien est de plus en plus appréhendé par les Anglo-saxons comme un obstacle à la colonisation, des alliances politiques entre confédérations indiennes[9] et représentants du roi sont néanmoins conclues : ainsi, au nord-est du territoire, de part et d’autre du lac Ontario, les Iroquois et les Hurons s’allient respectivement aux forces anglaises et françaises. Toutefois, les Indiens font, au final, le plus souvent figure de dupes : après la Guerre d’Indépendance (1775-1783) signant la défaite britannique, les Iroquois, ayant payé un lourd tribut en combattant aux côtés des Anglais, voient leur situation ignorée par les vainqueurs américains, sans pour autant soulever l’indignation de leurs anciens alliés.[10]

Malgré la résistance qu’elles opposent à la colonisation de leur territoire, les différentes nations indiennes sont incapables d’arrêter l’avancée de la frontière : leur lutte politique pour sauvegarder ce que les colons n’ont pas encore touché, se solde la plupart du temps par le reniement des promesses américaines, quand ce n’est pas leur violation pure et simple. Claude Fohlen analyse en ces termes les rapports qui ont été instaurés entre les colons britanniques et les Amérindiens : selon lui, les nouveaux arrivants britanniques ont toujours refusé l’Indien car, persuadés d’avoir en face d’eux « des Sauvages imperméables à ce qui, à leurs yeux, représentait la civilisation, ils ont élevé une barrière, que les historiens américains ont appelée frontière depuis Frédéric Jackson Turner. »

Cette frontière, à la fois no man’s land, barrière idéologique et culturelle, et finalement zone de contact, ne fut intégrée dans les esprits qu’au lendemain de l’Indépendance des Etats-Unis. Elle répond à plusieurs exigences : tout d’abord, elle sert à assurer la sécurité des colons, en leur permettant de se déplacer sans craindre les incursions indiennes ; deuxièmement, elle doit garantir le respect des nations indiennes et défendre l’intégrité de leurs territoires. Ainsi, entre 1784 et 1788, plusieurs traités garantissant les propriétés indiennes sont signés avec les Iroquois, les Delawares, les Chippewa et les Cherokees. Mais, d’une part, l’impossibilité de freiner l’ardeur des colons contre des « sauvages » considérés comme nuisibles et, d’autre part, les attaques indiennes perpétrées en représailles contre les forts américains, ne ralentissent pas le rythme des violences :

 

«  Au cours de la décennie qui a suivi l’indépendance, les problèmes économiques, la spéculation effrénée et les disputes relatives aux titres de propriété ont poussé de plus en plus de colons vers l’ouest, en quête de nouvelles terres, maintenant les Etats-Unis dans un état de guerre permanent contre les Indiens. »[11]

 

Les autorités américaines sont toutefois loin d’envisager comme injuste la lutte contre les tribus indiennes.[12] Selon un point de vue, qui en se radicalisant au début du XIXème siècle tend à devenir majoritaire dans certaines couches de la société américaine, l’existence des tribus indiennes est considérée comme radicalement incompatible avec l’occupation du territoire par les Américains. A ceci, s’ajoute la conviction que l’Amérique blanche est destinée par essence à s’étendre sur tout le continent nord-américain et que, par conséquent, l’Indien doit légitimement disparaître pour laisser place à la civilisation.[13]

Il est vrai que les Etats-Unis sont alors dans une phase d’expansion sans précédent dans leur histoire : aux treize Etats du départ sont venus se joindre ceux de l’est du Mississippi, auxquels vient s’ajouter en 1802 tout le bassin ouest du fleuve, appelé alors Louisiane, puis, peu avant le milieu du siècle, les territoires du sud et du nord-ouest. Au final, la carte des Etats-Unis telle que nous la connaissons aujourd’hui est déjà en grande partie dessinée vers 1850.

Cette expansion a pu être poursuivie grâce à la mise en place d’une nouvelle manière de traiter la question indienne. Cernés par la colonisation de leur territoire, les Indiens se voient proposer de nouvelles terres plus à l’ouest, sorte de réserves dans lesquelles les Indiens sont censés pouvoir vivre tranquillement jusqu’à la fin de leurs jours sans être inquiétés par l’expansion américaine. Dans un souci humanitaire, le déplacement de tribus entières est ainsi programmé sous la direction d’un commissaire aux Affaires indiennes nommé par le gouvernement fédéral. Toutefois, si ce déplacement est l’objet de négociations entre tribus et Etats et ne doit théoriquement pas être entrepris contre la volonté des Indiens, le cas des Cherokees fait tristement figure d’exemple : bien que dotés d’institutions politiques calquées sur celles des Etats-Unis, cette tribu civilisée située à l’est du Mississippi a vu sa souveraineté lui échapper et ses terres confisquées par les autorités géorgiennes. En 1829, le président Jackson, fervent partisan d’une politique d’expropriation, est élu et fait voter l’Indian Removal Act (1830), prévoyant le déplacement des tribus indiennes et la redistribution de leurs terres à ceux qui s’en portent acquéreur. Les Cherokees, au terme d’une lutte qui aura duré une décennie et déchirés par des divisions au sein même de leur camp, devront prendre « le sentier des larmes » pour s’établir dans une réserve de l’Oklahoma, parmi d’autres tribus déplacées.

 

 

 

Chronologie du « problème indien ».

 

 

1492            Christophe Colomb débarque sur un île des Bahamas avec ses trois caravelles. Quelques mois plus tard, l’Europe entière découvre l’existence du Nouveau-Monde.

 

1513            Prise de possession de la Floride par Ponce de Leon.

 

1537            Bulle papale Sublimus Deus, proclamée par le pape Paul III, affirmant officiellement la nature humaine des Indiens.

 

1581            Première mission au Nouveau-Mexique.

 

1607   Débarquement du Mayflower. Durant les premières années du XVIIème siècle, plusieurs attaques indiennes visent les nouveaux colons.

 

1763            Proclamation royale tentant de tracer une frontière entre les colonies britanniques et le « pays indien » à partir des Appalaches.

« Révolte de Pontiac ». Depuis le début du siècle, plusieurs guerres opposent Indiens et colons.

 

1775-1783                      Guerre d’Indépendance des États-Unis. En 1779, Georges Washington ordonne que les territoires iroquois « ne soient pas seulement conquis mais dévastés. » Les Iroquois s’engagent dans la lutte aux côtés des Britanniques et payent un lourd tribut. Le Traité de Paris, mettant fin à la révolution américaine, étend les frontières des États-Unis jusqu’au fleuve Mississippi.

 

1803            Achat de la Louisiane à la France. Le territoire des États-Unis se voit doubler.

 

1804            Le Congrès autorise le Président des États-Unis à négocier avec les Indiens pour échanger leurs terres de l’Est contre des réserves.

               Début de la politique de déportation des tribus qui entretiennent des relations paisibles avec les autorités des États-Unis.

 

1821            Indépendance du Mexique.

 

1826            Création officieuse d’un Bureau des Affaires Indiennes.

 

1827            La nation Cherokee constitue un gouvernement et se déclare indépendante. La Cour suprême des États-Unis reconnaît ce statut mais déclare les Cherokees « en état de tutelle ».

 

1830            Vote au Congrès de l’Indian Removal Act sur une proposition du Président Jackson. Cette loi prévoit le déplacement des tribus indiennes du Sud-Est vers l’Ouest, en territoire indien.

 

1832   Désignation d’un « commissaire aux affaires indiennes » sous la responsabilité du Département de la Guerre.

 

1845            Annexion du Texas, propriété du Mexique, par les États-Unis.

 

1862            Le Homestead Act accorde 64 hectares de terre à l’Ouest du Mississippi contre une modeste somme d’argent à quiconque s’engage à les cultiver pendant au moins cinq ans.

 

1861-1865         Guerre civile américaine.

 

1864      Massacre des Cheyennes à Sand Creek.

 

1865-1867    Batailles incessantes contre les Sioux.

 

1871            Le Congrès américain vote une loi interdisant la signature de traités avec les Indiens.

 

1876            La bataille de Little Big Horn se solde par une défaite du général Custer, commandant du 7ème régiment de cavalerie, battu par les Sioux et les Cheyennes réunis. « Cette victoire indienne ébranle l’opinion publique : une poignée d’Indiens résiste à l’armée américaine ! Custer devient un martyr de la cause de la civilisation » (Philippe Jacquin, la Terre des Peaux Rouges, op.cit., p.111). En outre, cette défaite génèrera chez les Américains un ressentiment à l’égard des Indiens qui sera une des explications du massacre de Wounded Knee.

 

1886   Capture de Géronimo, dernier chef apache à avoir mené la lutte en Arizona et au Nouveau-Mexique contre le déplacement de sa tribu vers une réserve indienne. Une affiche publicitaire pour le Wild West Show prétend que le général Miles (chargé de négocier avec les Apaches) aurait déclaré que Géronimo « était le pire Indien qui ait jamais vécu ». Manière de vanter la hardiesse du chef indien, cette publicité ajoute : « Sa capture coûta au gouvernement américain plus d’un million de dollars. » (cf. Philippe Jacquin, la Terre des Peaux-Rouges, op. cit., p.156)

 

1890            Le 29 décembre, massacre de Wounded Knee, au cours duquel « Trois cents Indiens environ sont tués sur place ou mourront des suites de leurs blessures. Treize soldats sont retrouvés morts, victimes apparemment de la nervosité de leurs camarades. Plusieurs membres du 7ème régiment de cavalerie se verront décerner la médaille d’honneur du Congrès en récompense de leur héroïsme. » (James Wilson, La Terre pleurera, une Histoire de l’Amérique indienne, pp.351-352). Les soldats américains qui ont tiré étaient chargés de conduire le chef Big Foot et ses compagnons à un rassemblement indien. « Pour les Euro-Américains, le massacre de Wounded Knee, et les images désolantes de cadavres recroquevillés et gelés dans la neige (...) symbolise de façon poignante la fin de la « frontière », d’un processus d’expansion continue qui s’est déroulé sur plus de trois siècles (...). L’ « Indien » qui avait barré la route (...) était finalement vaincu. Enfant de l’Éden ou bête sauvage vivant dans un désert, il était enfin renvoyé à son cadre naturel : le passé. » (ibid.)

 

1924            Octroi de la citoyenneté américaine à tous les Indiens.

 

1953-1954         Début du processus de termination, visant la suppression des réserves indiennes.

 

1960-1970    Début de la lutte pour la reconnaissance des droits indiens.

 

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[1] Parmi les nombreux ouvrages adoptant ce point de vue, signalons Dee Brown, Enterre mon cœur, (éd. Arista, 1970) et plus récemment James Wilson, La terre pleurera, une histoire de l’Amérique indienne, Albin Michel, coll. Terre Indienne, 2002 (édition originale américaine, 1998).

[2] James Wilson, op. cit., p.56.

[3] Ibid., p.35.

[4] Ibid., p.36

[5] Cette idée trouve son fondement chez les penseurs européens, notamment chez le philosophe anglais John Locke, qui fondent le concept de propriété naturelle à partir de l’idée de travail. Dans cette perspective, un territoire n’appartient réellement qu’à celui qui le cultive.

[6] Nous ne parlons ici que des colonies anglaises de l’Amérique du Nord et non des colonies espagnoles et françaises, dont nous évoquerons plus loin l’attitude envers les peuples indiens qu’ils ont colonisés.

[7] James Wilson rapporte ces paroles de Georges Washington à propos des guerriers indiens qui ont combattu avec les troupes auxquelles il appartenait : « Ils sont beaucoup plus efficaces que le double d’hommes blancs. S’ils s’en retournent dans leur nation, il n’y aura pas de mots assez forts pour dire à quel point ils nous manqueront. » (Cf. James Wilson, op. cit., p.160)

[8] James Wilson, op. cit., p.112 : “Il est difficile d’imaginer l’impact de ce désastre sur la vie des Indiens. Le taux de mortalité excédaient largement tout ce qu’ont connu les nations occidentales modernes. Par exemple, la Première Guerre mondiale (...) a causé la mort de deux pour cent de la population britannique en quatre ans, alors que beaucoup de communautés amérindiennes ont perdu soixante-quinze pour cent de leurs membres en quelques semaines seulement ». Il est à noter que ces maladies ont parfois été utilisées comme arme biologique contre les Indiens : l’exemple le plus souvent cité eut lieu au milieu du XVIIIème siècle, pendant la « guerre de Pontiac », lorsque le commandant d’un fort anglais, Amherst, invitant à des pourparlers des chefs Delawares révoltés, leur offrit des couvertures contaminées par la variole, dans le dessein de porter un coup à la résistance indienne (Cf. James Wilson, p.172).

[9] Sous le terme de confédération se cache en fait le regroupement d’une ou de plusieurs tribus indiennes. Ainsi, au XVIème siècle, la confédération des Iroquois (dont le nom indien exact est « Hotinonshonni ») regroupait cinq tribus : les Mohawk, Oneida, Onondaga, Seneca et Hiawatha. Ce qui a pu faire croire aux premiers arrivants que le système tribal amérindien s’apparentait à l’anarchie.

[10] James Wilson, op. cit., p.176. Même si on estime que le nombre d’Iroquois avait déjà été réduit de moitié vers 1630-1640, la guerre d’Indépendance des Etats-Unis n’a toutefois pas signé l’extinction des Iroquois (cf. C. Fohlen, op. cit.).

[11] James Wilson, op. cit., p.202.

[12] James Wilson cite ces lignes écrites par Martin van Buren, huitième président des Etats-Unis de 1837 à 1841 : « Aucun Etat ne connaîtra la culture, la civilisation et le progrès, tant qu’on permettra aux Indiens d’y demeurer. » C’est dire la barrière qui sépare les colons, prétendument civilisés, de ces peuples que l’on considère comme irrécupérables et incapables d’adopter des mœurs civilisées.

[13] Bien après que cette théorie a engendré ses premières conséquences, le journaliste américain John O’Sullivan lui donne le nom de « destinée manifeste » (manifest destiny), croyance en un destin singulier pour les États-Unis, derrière laquelle se réfugient tous ceux qui, durant la seconde partie du XIXème siècle, revendiquent la destruction du peuple indien.

Mémoire de lettres modernes d'Emmanuel Dubosq.